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26.04.2014

Déjà vu



dans la nuit glacée

les visages sont verts

blêmes sous les lumières

des yeux fatigués

font des trous dans le noir

des taches rouges pour voir

 

la lune regarde presque brune

toute nue frileuse dans le ciel

une femme qui rit et qui fume

toute seule les veines pleines de miel

les rues sont tranquilles

le vent souffle sur la ville

les rues sont tranquilles

le vent souffle sur la ville

 

des jardins privés

pour des fruits distingués

s’ouvrent à six heures passées

sur le bout des lèvres

l’amour entre initiés

laisse un goût si sucré

 

des jambes molles en nylon

des joues poudrées et ridées

elles sont des îles désertées

trop vieilles pour plaire aux garçons

l’argent est tranquille

l’amour est moins facile

l’argent est tranquille

l’amour est moins facile

19.04.2014

La maison de l'amour



il te faudra le plus long des couteaux

pour toucher mon cœur

et que tu tiennes tête au ciel longtemps

pour être ma sœur

si tu viens me voir un jour

dans la maison de l’amour

 

personne ne s’est jamais assis

de ce côté-ci de mon verre

mais qui pourra jamais prêter

son visage à mon frère

le roi est seul dans la cour

derrière la maison de l’amour

 

je porte en moi le poids de mille enfants

qui n’ont pas pu naître

ils tueraient leur père juste pour voir

la mer par la fenêtre

s’ils avaient droit de séjour

dans la maison de l’amour

 

ce que tu prends ne t’appartient

que le temps que tu tends ta main

mais donne ton âme à mes chiens et tu verras

ils te la rendront bien

si tu viens me voir un jour

dans la maison de l’amour

 

oh viens me voir un jour

dans la maison de l’amour

12.04.2014

Belle de nuit

 

le drap est gris et zébré de rides

la ville s’est tue la bouteille est vide

mais la poudre blanche et les billets de cent

attisent ses sens et font danser son sang

 

sa robe est en boule dans un coin

son slip et ses bas sont un peu plus loin

la nuit est plus chaude que le matin

sa peau est si douce sous ses mains

 

une ombre longue s’est tapie

dans la rue sombre sous la pluie

 

sa langue est molle et lente et lisse

un doigt se glisse entre ses cuisses

sa fente s’ouvre et ses yeux se ferment

sa main se fait un peu plus ferme

 

la salive mouille ses lèvres

son dos se cambre ses jambes s’élèvent

mais quel est ce bruit qu’elle a entendu

une ombre est là qu’elle n’avait pas vue

la femme s’affole l’homme sourit

dans l’obscurité une arme luit

 

la nuit est noire le drap devient rouge

le silence est lourd plus rien ne bouge

 

une balle est si vite perdue

demain le coupable aura disparu

une balle est si vite perdue

demain le coupable aura disparu

demain le coupable aura disparu

demain le coupable aura disparu

06.04.2014

Moé j'boé

 

y en a qui triment

y en a qui friment

moé j’boé

y en a qui roulent

y en a qui coulent

moé j’boé

y en a qui niaisent

y en a qui baisent

y en a qui dansent

y en a qui pensent

y en a qui plient

y en a qui crient

moé j’boé

 

j’ai tellement bu

je n’en peux plus

oh quel calvaire

que vais-je faire

je vas aller boire

 

y en a qui volent

y en a qui collent

moé j’boé

y en qui vissent

y en a qui plissent

moé j’boé

y en a qui dorment

y en a qui bumment

y en a qui chassent

y en a qui placent

y en a qui mouillent

y en a qui rouillent

moé j’boé

 

j’ai tellement bu

je n’en peux plus

oh quel calvaire

que vais-je faire

je vas aller boire

 

j’ai tellement bu

je n’en peux plus

oh quel calvaire

que vais-je faire

je vas aller boire

25.03.2014

À vos côtés



laissez-moi pas m’éloigner

m’en aller m’ennuyer

mais gardez-moi à vos côtés

juste le temps de m’apprivoiser

j’ai tant cherché pour vous trouver

gardez-moi à vos côtés

 

dans tous mes rêves je vous ai parlé

chicanée maltraitée

mais gardez-moi à vos côtés

si mes colères vous ont blessée

c’est peut-être que vous m’aimiez

gardez-moi à vos côtés

 

pour une poignée de pleurs séchés

je vous aurais abandonnée

mais gardez-moi à vos côtés

effarouché tout étonné

le temps viendra où j’en rirai

gardez-moi à vos côtés

 

j’ai vu mes automnes s’embrumer

mes hivers frissonner

mais gardez-moi à vos côtés

jusqu’au printemps jusqu’à l’été

quand l’air sera bon à manger

gardez-moi à vos côtés

 

et quand le jour voudra baisser

dans mes yeux fatigués

gardez-moi à vos côtés

la nuit qui viendra je le sais

vous laissera dans mes pensées

gardez-moi à vos côtés

oh gardez-moi à vos côtés

11.03.2014

Ti-corps



si j’avais un corps

ça changerait ma vie

zou zou zou ma jolie

22.02.2014

Ce 22 juin 1633

08.02.2014

D'une victoire

 

ce sont d’étranges villes

que nous avons gagnées

d’étranges combattants

que nous avons vaincus

 

ces hommes comme nous

qui en voulaient aux hommes

ils voulaient verrouiller

notre malheureux monde

 

nous les avons bien vus

eux et leur majesté

leur santé leur bêtise

et leur méchanceté

 

des chefs couronnés d’ombre

qui ne comprenaient rien

qui riaient des victimes

plus fortes que leur force

 

ces morts voulaient la mort

ces morts voulaient des tombes

pour les pieds de la mort

ils marchaient en arrière

 

contre la foule immense

contre le vieil espoir

qui nous libérera

à jamais de la haine

 

ce sont d’étranges villes

que nous avons gagnées

d’étranges combattants

que nous avons vaincus

 
(Texte : Paul Éluard)