09.11.2015
Comme un poète
je suis un sans abri fiscal / je ne m’en porte pas plus mal / c’est normal d’être anormal / au temps du temps du Grand Chacal
je dis que mon nom est nombreux / et je dis que je suis de ceux / qui gagnent à jouer un autre jeu / que le jeu qu’on veut jouer pour eux
j’ai dansé comme une oriflamme / au-dessus de l’organigramme / j’ai vu les maîtres moi madame / les tuer était mon programme
enivre-moi délivre-moi / de mes livres et de mes émois / que mon savoir me laisse froid / que ma blessure me fasse roi
je veux mourir comme je vis / dans la langue dans laquelle je chie / sans drapeau si ce n’est celui / de ton collant noir dans la nuit
j’ai le temps d’étreindre le feu / pour mourir jeune je suis trop vieux / et si E = mc 2 / pourquoi aurais-je besoin d’un dieu
je sais que plus c’est moins mieux c’est / et que pour vivre je vivrai / les mains vides et libre et léger / comme un poète sans papiers
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31.10.2015
Les regrets de la belle heaulmière
le front ridé, les cheveulx gris, / les sourcilz cheuz, les yeulx estainctz, / qui faisoient regars et ris, / dont maintz marchans furent attaincts ; / c’est d’humaine beauté l’yssues ! / les bras courts et les mains contraictes, / les espaulles toutes bossues ; / mammelles, quoy ! toutes retraictes.
ainsi le bon temps regretons / entre nous, povres vieilles sottes, / assises bas, à croppetons, / tout en ung tas comme pelottes, / à petit feu de chenevottes, / tost allumées, tost estainctes ; / et jadis fumes si mignottes !... / ainsi en prend à maintz et maintes.
quand me regarde toute nue, / et je me voy si très-changée, / povre, seiche, mesgre, menue, / je suis presque toute enragée. / ha ! vieillesse felonne et fière, / pourquoy m’as si tost abatue ? / que me tient que je ne me fière, / et qu’à ce coup je ne me tue.
Texte : François Villon / Adaptation : Serge Viau
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17.09.2015
Dis-lui d'attendre encore
et ceci s’est passé / comme passent les années / et toi tu es resté
le vent peut-il te dire / s’il y a un avenir / pour tous ces souvenirs
la vieille valise est vide / tu y mettras tes rides / vivre est un homicide
mais si la ville est noire / tu peux reprendre espoir / il va neiger ce soir
il va neiger ce soir / tu peux reprendre espoir / la nuit comme un habit / te tient au chaud ici / il reste une bouteille / et tu n’as pas sommeil / ce soir
il va neiger ce soir / tu peux reprendre espoir / le ciel tout doucement / va se saigner à blanc / le monde va cesser / tu l’as bien mérité / ce soir
et ceci passera / et rien ne restera / ni la neige ni toi
le vent peut te le dire / tu n’es qu’un souvenir / qui n’a pas d’avenir
jette la vieille valise / la leçon est apprise / partir n’est pas de mise
mais si tu vois la mort / même si tu as tort / dis-lui d’attendre encore
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